Les souvenirs

"Le goût des pépins de pomme"



Je viens de lire ce livre sur un coup de coeur : la lecture au hasard d'un extrait, et je ne l'ai plus lâché...

"Je tirai une jatte émaillée du buffet et me rendis au potager pour y cueillir des groseilles. Familière m'était la sensation  que procurent au toucher les petites grappes tièdes qu'il faut saisir d'une main, délicatement, comme s'il s'agissait d'oeufs de merle, et que l'on détache en pinçant entre les ongles le haut de leur tige, tout en retenant de l'autre main la branche qui les porte. Mes doigts s'activaient, rapides et sûrs, et le récipient fut vite plein. Je m'assis sur un tronc de pin couché en travers du fond du jardin et mangeai les groseilles en faisant glisser les grappes, une à une, entre mes dents pour en détacher les baies diaphanes. Elles étaient à la fois acidulées et sucrées, les grains amers et le jus tiède."
Avez-vous maintenant envie de manger des groseilles ? c'est normal...


c'est aussi une histoire qui se passe dans un jardin, un peu sauvage, peut-être comme celui-ci
Voici une belle histoire de famille, compliquée, un peu triste,  mais parfois aussi simple. Une vieille maison pleine de souvenirs, au fin fond de l'Allemagne en plein été. Il fait chaud, très chaud... (oui, c'est possible même au nord de l'Allemagne !).
De vieux meubles, des escaliers qui grincent, un jardin un peu magique aux pommiers étranges. Un carnet secret de grand-père rempli de ses poèmes, une bibliothèque aux livres bizarrement rangés changeant sans arrêt de place.

C'est l'histoire de trois soeurs, de deux cousines et leur amie, de leurs grands-parents, d'une famille, de trois générations de femmes.
"Rosemarie était la mystérieuse, Mira la dévergondée, moi la grassouillette. (...)J'aimais lire et manger en même temps. Une tartine après l'autre, un gâteau après l'autre, sucré et salé en continuelle alternance. C'était merveilleux : les histoire d'amour avec une portion de gouda, les récits d'aventures avec du chocolat aux noisettes, les drames familiaux avec du muesli, les contes de fées avec des caramels mous, les romans de chevalerie avec des cookies.
Et aussi longtemps que je mangeais en lisant, il n'y avait aucun problème. J'étais tout ce que l'on pouvait être, sauf moi-même. Mais il ne fallait surtout pas que je m'arrête de lire.""

Les pertes de mémoire de la grand-mère Britta, sa maladie, nous amènent à nous questionner sur les souvenirs.
"Je songeai aux poèmes dans lesquels Hinnerk parlati de son village où s'exprimait tout l'amour que lui inspiraient les lieux de son enfance. Cette enfance qu'il avait tant haïe.
J'en déduisis que l'oubli n'est pas seulement une forme du souvenir, mais que le souvenir est aussi une forme de l'oubli."

Mais ce livre ne se passe pas que dans le passé, la narratrice vit aussi des choses au présent, et retrouve des personnages de son passé, comme Max, ce petit frère de son amie Rosemarie, devenu grand et qui a décidé de rester dans ce village calme et un peu perdu... où il ne se passe pas grand'chose...
"Il se passe si peu de choses ici que je vais parfois m'asseoir au cimetière pour y boire un coup de rouge, et je fais cela uniquement pour qu'il se passe quelque chose. Je suis un type qui s'ennuie à mourir et qui est tout juste assez intelligent pour s'en rendre compte. Pas de chance pour moi."

C'est une belle lecture et d'une romancière allemande, ce qui pour moi est assez rare... je m'aperçois que je lis surtout des auteurs français ou britanniques, à quelques exceptions près.
Et tant mieux quand il y a d'aussi belles exceptions !
Comme quoi on peut "tomber" sur un livre par hasard, et l'adorer. Ça vous est déjà arrivé ?

Le goût des Pépins de pomme - Katharina Hagena - Editions Anne Carrière 2008
Résumé :
A la mort de Bertha, ses trois filles, Inga, Harriet et Christa, et sa petite-fille, Iris, la narratrice, se retrouvent dans leur maison de famille, à Bootshaven, dans le nord de l'Allemagne, pour la lecture du testament. A sa grande surprise, Iris hérite de la maison et doit décider en quelques jours de ce qu'elle va en faire. Bibliothécaire à Fribourg, elle n'envisage pas, dans un premier temps, de la conserver. Mais, à mesure qu'elle redécouvre chaque pièce, chaque parcelle du merveilleux jardin qui l'entoure, ses souvenirs se réveillent, reconstituant l'histoire émouvante, parfois rocambolesque, mais essentiellement tragique, de trois générations de femmes.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Good Bye Farewell

to be created

a Wish